Le surprenant film d'épouvante Barbarian (2022) n'était pas une erreur de parcours. Un nouveau maître de l'horreur est en train de surgir de l'ombre et, avec Weapons, le réalisateur et scénariste Zach Cregger se lance dans une épopée encore plus ambitieuse.
Que s'est-il passé à 2h17 du matin pour que 17 enfants d'une même classe quittent leur domicile en courant et disparaissent sans laisser de trace? C'est le mystère qui plane sur ce long métrage hantant et traumatisant qui n'est pas sans rappeler le classique Picnic at Hanging Rock de Peter Weir et l'implacable Prisoners de Denis Villeneuve : deux modèles du genre quand vient le temps de traiter de la volatilisation de jeunes âmes.
Le sujet est surtout un prétexte pour aborder les peurs d'une communauté et, métaphoriquement, de l'Amérique. À l'image du récent Eddington d'Ari Aster, les individus multiplient les actions répréhensibles en temps de crises et leurs traumas ne tardent pas à réveiller une hypocrisie et une violence qui sommeillaient au plus profond d'eux. En débutant comme un conte des frères Grimm, la production finit par évoquer les romans de Stephen King et même le cinéma onirique de David Lynch.
Le récit emprunte au film choral, le cinéaste ayant avoué en entrevue s'être inspiré du chef-d'oeuvre Magnolia de Paul Thomas Anderson. Non seulement cette structure en chapitres permet de multiplier les points de vue afin de recoller les morceaux d'un casse-tête obsédant, mais il permet d'utiliser la tragédie intime de façon épique et universelle. Sans doute que l'effort, longuet et répétitif, démystifie trop ses énigmes dans sa dernière ligne droite au lieu de garder secrets ses arcanes. L'ensemble est néanmoins dynamité par une mise en scène d'une rare efficacité, réglée comme un thriller infernal, dont la tension augmente progressivement pour mieux exploser à la figure du spectateur.
Centré autour de ses personnages souvent antipathiques qui multiplient les actions discutables, le long métrage permet à ses acteurs de briller même s'ils en mettent parfois trop. C'est le cas notamment de Julia Garner (The Fantastic Four: First Steps), tour à tour énervante et attachante en enseignante dépassée par les événements, et Amy Madigan (Field of Dreams), d'un grotesque délectable en tante cachottière. C'est cependant Josh Brolin (Dune) qui trouve le rôle le plus intéressant, amenant une humanité certaine à cette figure de père éploré.
Weapons s'apparente à un véritable tour de manège à sensations fortes. C'est stressant et amusant, bouleversant et haletant, fascinant quand le fantastique vient brouiller les cartes à la façon de Longlegs. Il s'agit surtout d'une oeuvre terrifiante qui fera hurler de peur lors de moments inquiétants. C'est le cas quand les rêves se mettent de la partie et que l'inconscient ne fait qu'une bouchée du réel. Zach Cregger est sur une lancée irrésistible après deux créations cauchemardesques et espérons qu'il ait les coudées franches pour son prochain projet: le redémarrage cinématographique de la série de jeux vidéo Resident Evil.