L'expression « Nous ne formons qu'un » que l'on entend souvent en parlant d'une relation fusionnelle prend un tout autre sens dans Together, une oeuvre complètement cinglée qui, de Sundance à Fantasia, a étonné les cinéphiles du monde entier.
Le film démarre en trombe avec une introduction saugrenue qui annonce et résume tout ce qui va suivre. Un couple a disparu et les autorités se lancent à leur recherche. Deux chiens pisteurs suivent leurs traces et ils ne reviendront pas indemnes à la maison...
Le mystère est en place et il finit pas s'immiscer dans l'existence de Millie (Alison Brie) et Tim (Dave Franco), deux partenaires amoureux depuis une décennie qui tentent de donner un second souffle à leur union en déménageant loin de la ville. Mais depuis une promenade en forêt, plus rien n'est comme avant. Leurs corps s'attirent comme des aimants, ce qui provoquent des situations de plus en plus problématiques.
Pour son premier long métrage qu'il a écrit et réalisé, Michael Shanks s'amuse à plonger tête première dans le body horror, un genre qu'affectionne David Cronenberg. Il arrive à pondre des situations incroyables en liant des corps de différentes façons, passant par toutes la gamme des émotions. Ce qui débute comme une comédie romantique classique se mute rapidement en bal de l'horreur imprévisible et complètement grotesque qui emprunte son lot de motifs au septième art asiatique (particulièrement à Ringu et Ju-On).
Sa mise en scène alimente une tension sourde qui ne dérougit pas avant la fin, à la fois au niveau de la musique obsédante que des sursauts parfois gratuits. Ces derniers naissent généralement la nuit lors de rêves inquiétants, au moment où le subconscient prend le contrôle des êtres. Le récit joue constamment de contrastes en rappelant que peurs et rires ne sont souvent que les deux faces d'une même pièce. Quelques séquences plus traumatisantes sortent du lot, gracieuseté d'un montage parallèle assez équivoque.
Le tout aurait pu sombrer dans le ridicule sans l'apport de ses personnages. En choisissant un véritable couple, la production mise sur une authenticité indéniable. Même s'il n'a pas eu la carrière de son frère James, Dave Franco a su se faire valoir dans des productions marquantes comme Love Lies Bleeding et Zola. Il s'investit totalement dans cette création qui sort des sentiers battus, ne formant qu'un avec la toujours excellente Alison Brie qui a parfois plus brillé à la télévision (Mad Men, Community) qu'au cinéma.
Together s'apparente toutefois plus à The Substance qu'à Titane. Si l'ensemble est effectivement dérangeant et même effrayant à ses heures, l'humour finit par avoir le dernier mot. Cela donne des moments hilarants comme une partie de jambe en l'air inappropriée. Mais ces instants qui feront hurler de rire l'auditoire (découvrir le film dans une salle de cinéma bondée est une expérience assez mémorable) se fait au détriment d'un script qui tourne parfois les coins ronds et qui ne va pas suffisamment en profondeur.
C'est d'autant plus dommage que la matière première ne manquait pas. Ces corps qui s'attirent inlassablement deviennent la métaphore de la peur de l'engagement et, surtout, de la codépendance. Lorsque le JE disparaît totalement au profit du NOUS, les problèmes débutent et l'essai le montre physiquement sans lésiner sur aucun détails. Le parallèle est tellement fort et palpable que l'ensemble n'avait pas nécessairement besoin de se perdre dans une sous-intrigue à connotation mythologique et symbolique.
Cela n'empêchera pas de prendre son pied devant cette oeuvre subversive et profondément divertissante, dont la dernière scène alimentera à coup sûr les discussions. À la fois hilarante et répulsive, Together jette un regard nouveau et cauchemardesque sur la dynamique du couple. Qui a déjà dit « je t'ai dans la peau » ne le mentionnera probablement plus jamais après avoir vu le long métrage.