Adam (fabuleux Patrick Hivon) est un gentil propriétaire de chenil en proie à la dépression et à l'écoanxiété. Dans son petit village, l’homme de 45 ans semble plus à l’aise avec ses chiens qu’avec les humains. Profondément triste, il semble tout de même résilient et fait tout ce qu’il faut faire pour améliorer son sort : médication, méditation, lithothérapie et… luminothérapie. C’est justement en faisant l’acquisition d’une lampe thérapeutique que sa vie bascule. Non pas parce que l’efficacité de ladite lampe est redoutable, mais plutôt parce qu’en appelant le numéro de soutien technique (ou soutien psychologique?), Adam tombe amoureux de la voix envoûtante au bout du fil : celle de Tina (Piper Perabo), représentante du service à la clientèle.
Un homme triste et la voix suave d’une inconnue… Vous avez une impression de déjà vu? Vous pensez, vous aussi, à Her (2014)? En entrevue lors de la Quinzaine des cinéastes du Festival de Cannes en mai dernier, la réalisatrice Anne Émond a admis avoir été influencée par l’excellent film de Spike Jonze, tout en souhaitant aller au-delà du fantasme et matérialiser la voix: lui donner une vraie vie, lui faire vivre des problèmes… bref, la rendre vraiment concrète.
Mais voilà, si Her est un poème mélancolique susurré dans une lumière pastel, Amour Apocalypse est une comédie romantique un peu trash où deux écorchés vifs sont catapultés dans une quête un peu absurde (mais malgré tout profondément humaine), en pleine crise climatique.
Ici, on ne flotte pas entre rêverie et douceur mélancolique. On navigue plutôt difficilement entre comédie romantique, drame, aventure et dystopie climatique. Dans les deux cas, on parle d’amour, d’anxiété existentielle et de solitude. Alors que l’un choisit la délicatesse d’un futur aseptisé, l’autre plonge tête première dans le chaos très organique du présent… entre Thetford Mines et Sudbury.
Si le scénario d’Amour Apocalypse est un peu léger et que certaines scènes comiques manquent de subtilité, l’ensemble parvient tout de même à susciter quelques sourires. Évidemment, la mise en scène reprend le vieux cliché de la météo qui reflète l’état intérieur des personnages : la fameuse « tempête intérieure ». Cette analogie entre dérèglement psychique et dérèglement climatique finit par ramener l’enjeu à une affaire personnelle, presque intime, ce qui évacue malheureusement la dimension politique. Oui, l’écoanxiété est bien réelle. Mais non, la crise climatique ne se résoudra pas en flattant des cristaux et en brûlant de l’encens. Le film ne dénonce le capitalisme que par bribes, alors qu’Adam avoue ne pas être un grand consommateur ou lorsqu’il crève les pneus d’un VUS – davantage pour impressionner sa nouvelle flamme que par militantisme.
Heureusement, le film est sauvé (de l’apocalypse?) par l’interprétation sans faille de Patrick Hivon et Piper Perabo, dont la complicité à l’écran apporte une vraie tendresse au récit.
Non, ce film ne changera pas le monde (ni le climat!), mais il nous rappelle que, dans un monde en feu, on peut encore tomber amoureux… entre deux séances chez la psy et un appel au service à la clientèle.