Série fossilisée depuis belle lurette, Jurassic Park redevient pertinent grâce à Jurassic World: Rebirth, un septième épisode qui retrouve en partie la splendeur d'antan.
Sorti en 1993, Jurassic Park de Steven Spielberg a révolutionné le septième art avec ses avancées technologiques (autant au niveau du son que des effets spéciaux). Beaucoup plus classique, l'histoire demeurait tout de même fascinante et émouvante, faisant passer ses personnages humains avant ses créatures préhistoriques. Après une suite encore plus délirante qui se terminait comme King Kong et un troisième épisode enfantin qui aurait dû enterrer la série à jamais, la licence a ressuscité de ses cendres il y a une décennie avec une nouvelle trilogie sans saveur. Même le valeureux Jeff Goldblum, héros de ces aventures depuis les tous débuts, finissait par lancer à la fin de Dominion (2022) un très senti « je déteste Jurassic World » qui reflétait le sentiment du spectateur.
Rebirth prend l'affiche et il semble être fait du même moule. Il y a des méchants qui veulent exploiter les dinosaures pour le profit, une mercenaire (Scarlett Johansson) et son équipe qui débarquent sur une nouvelle île hostile, un paléontologue (Jonathan Bailey) trop heureux de découvrir en vrai son domaine d'études, un père qui craint pour la sécurité de ses deux enfants, etc. Le modèle est toujours celui d'Alien, avec les acolytes inutiles qui se font rapidement trucider, alors qu'on n'ose jamais toucher aux personnages principaux qui pourraient réapparaître dans une suite.
Le retour du scénariste David Koepp est toutefois bénéfique. C'est lui qui a signé l'histoire des deux premiers volets et il a travaillé ici en étroite collaboration avec Steven Spielberg. Cela se fait sentir sur le plan philosophique et émotionnel. Les situations et les personnages se veulent plus denses et complexes. On n'hésite d'ailleurs pas à retarder l'action au profit d'une discussion mélancolique sur le passé. Ce désir de profondeur psychologique ne fait toutefois pas toujours bon ménage avec le ton général du long métrage, qui flirte davantage avec la série B. Les tentatives d'humour sont tellement désespérées qu'elles tombent généralement à l'eau, à l'image de la pitoyable introduction.
Évidemment, on ne va pas voir un tel film pour sa trame narrative, mais pour ses scènes d'action explosives. Elles sont nombreuses et spectaculaires, parmi les meilleures de la série. Elles sont suffisamment variées pour ne pas ressentir qu'il y en a trop, développant une tension qui est la bienvenue. Adepte de films de monstres de qualité, tels Monsters (2010) et Godzilla (2014), le cinéaste Gareth Edwards est dans son élément naturel, créant des images fortes qui marquent les esprits. Il avait sans doute plus de liberté créative sur son précédent et éblouissant The Creator (2023), ce qui ne l'empêche pas d'user à merveille de son montage parallèle, comme sur son bien-aimé Rogue One (2016) et de mettre en valeur ses dinosaures génétiquement modifiés.
Malgré tout son talent et l'immense budget en place, il n'y a rien de véritablement nouveau sous le soleil. Tout cela a déjà été vu auparavant. « Les dinosaures n'impressionnent plus personne », lance même un individu au début du récit. Sans le facteur émerveillement, le film ressemble à une sortie générique au zoo. Les héros sont peut-être campés par des acteurs charismatiques, comme Scarlett Johansson et Mahershala Ali (oscarisé pour Green Book et Moonlight), leurs personnages relèvent du simple archétype. Pourquoi alors ne pas avoir renversé le regard? En troquant le point de vue des humains pour celui des animaux - comme dans les récents épisodes de The Planet of the Apes -, il aurait été aisé d'accéder à une nouvelle gamme de sentiments et de sensations, et ainsi apporter un vent de fraîcheur à l'ensemble.
Meilleur tome de la série depuis The Lost World (1997), Jurassic World: Rebirth tente de faire table rase du passé en revenant à l'essence de la licence. Si ses scènes d'action se révèlent renversantes, le long métrage demeure trop collé à l'original, passant son temps à lui rendre hommage au lieu d'exister par lui-même. Steven Spielberg a ouvert une boîte de Pandore en pondant une suite à son classique Jurassic Park et personne ne semble être capable de la refermer. Ce septième effort a le mérite d'essayer et il parvient à divertir avec efficacité, ramenant par l'occasion au bercail les fans échaudés par la précédente trilogie.