Sorti il y a plus de 10 ans, John Wick est devenu un film culte du long métrage d'action grâce à ses suites qui étaient toutes plus spectaculaires et mouvementées les unes que les autres. Après une quatrième aventure complètement délirante qui laissait peu de place à un cinquième volet, la licence se poursuit sous la forme d'un dérivé, Ballerina, une pâle copie de tout ce qui s'est fait auparavant.
Cette fois, ce n'est pas un tueur, mais une tueuse qui accapare l'attention. Ayant vu son père mourir sous ses yeux, Eve (Ana de Armas) rejoint la troupe de danseuses de la Directrice (Anjelica Huston) qui l'entraîne au ballet... et au meurtre! Les années passent et la jeune fille s'est graduellement transformée en assassine douée. Un jour, une mission la replonge dans son passé trouble...
Se déroulant en parallèle et après John Wick: Chapter 3 (il y avait déjà cette école de ballerines assassines dans Parabellum), l'oeuvre emprunte l'éternel schéma narratif de Nikita: celui de la femme fatale qui prendra sa place par le meurtre dans un monde dominé par les hommes. On retrouve même le toujours excellent Gabriel Byrne en antagoniste, lui qui jouait dans le remake américain Point of No Return en 1993. Prévisible et routinier, le scénario accumule les passages obligés (dont les séances d'entraînement) et les dialogues qui sonnent creux. Pourquoi explorer les zones sombres des personnages, autant au niveau de la vengeance que de l'héritage familial, si l'on peut seulement demeurer en surface?
Difficile de s'intéresser à tout ce qui arrive tant le sort de la protagoniste laisse complètement indifférent. Ce personnage de ballerine ressemble souvent plus à un robot qu'à une humaine et ce n'est guère surprenant d'y retrouver Ana de Armas, que l'on découvrait notamment en androïde au sein de Blade Runner 2049. L'actrice, épatante à l'époque de Blonde et Knives Out, n'est pas très à l'aise et convaincante dans ce rôle monolithique. Si elle affrontait déjà Keanu Reeves dans le suspense horrifique Knock Knock d'Eli Roth, elle n'arrive pas à la cheville de John Wick qui monopolise encore tous les regards lorsqu'il apparaît enfin à l'écran.
Évidemment, l'intérêt principal de la série réside dans ses scènes d'action et Ballerina emprunte les mêmes motifs esthétiques et sonores qui constituent désormais une formule éprouvée. La séquence la plus emblématique est celle se déroulant à la discothèque. La musique lourde et les couleurs néon apportent déjà une ambiance particulière. Puis viennent les séances de combats, violentes à souhait, et les chorégraphies, pas piquées des vers. Pourtant, le tout a déjà été vu des dizaines de fois par le passé.
Ironiquement, le cinéaste des quatre premiers volets, Chad Stahelski, a cédé sa place à un autre réalisateur afin d'amener un vent de fraîcheur au projet. Le choix de faire appel à Len Wiseman n'était peut-être pas le bon. Sa carrière cinématographique se résume à Underworld (et ses dérivés) et des remakes oubliés (Total Recall, Live Free or Die Hard). Beaucoup plus limitée, sa mise en scène souffre des comparaisons avec son prédécesseur.
C'est surtout le manque chronique d'idées qui fait mal. L'action se résume ici à changer l'arme du crime. Mais que l'on attaque avec des grenades, un patin à glace ou un lance-flamme, l'effet est le même et la progression devient rapidement répétitive même si les péripéties sont transposées dans des lieux différents. Surtout que le ton n'est pas clair. Parfois, l'ensemble se prend davantage au sérieux, retrouvant la grâce mythologique du deuxième et troisième épisode. Puis tout d'un coup, place à un moment complètement absurde digne d'un dessin animé ou du quatrième tome qui n'avait pas fait l'unanimité. C'est le cas notamment lorsque deux personnages se lancent des assiettes au visage... comme le faisaient régulièrement les Trois Stooges à une autre époque!
Film d'action anonyme et conventionnel, Ballerina satisfera probablement les irréductibles du genre, mais demeure - et de loin - l'épisode le plus faible de la franchise. Difficile de révolutionner une licence aussi populaire et explosive... à moins de s'appeler Mission: Impossible. Ce nouveau long métrage n'y arrive malheureusement pas et la pression est grande sur sa suite - le tout se termine de la même façon que John Wick: Chapter 2 - qui prendra sûrement l'affiche dans les prochaines années.