Après un indéniable succès avec les capsules sur le web, Le cas Roberge passe au grand écran. Toute l'équipe est réunie, devant et derrière la caméra, pour présenter les aventures du vadrouilleur urbain Roberge, à la recherche d'un emploi, d'amour et d'un peu d'inspiration, des rues du Plateau Mont-Royal aux motels de Rouyn-Noranda.
Réalisé par Raphaël Malo, le film met en vedette Benoît Roberge, Sébastien Benoît, Stéphane E. Roy, Jean-Michel Dufaux et est produit par Nicole Robert.
Rencontre avec eux.
Benoît Roberge Quelle différence entre les capsules sur le web et un long métrage pour le cinéma? « On a commencé à écrire le film avant les capsules. Quand on s’est remis au scénario, on avait beaucoup appris des capsules. Si on n’avait pas fait les capsules, on serait arrivé moins préparé pour le cinéma. On a pu pratiquer. C’est un bon exercice de pondre une capsule chaque semaine. » « Le fait que Raphaël puisse se concentrer sur diriger, on dirait que ça a mis tout le monde en confiance. On était plus calmes. » Est-ce une mode de faire des films sur soi? « Je ramène ça dans mes goûts personnels. À la base, j’avais le goût d’écrire une histoire qui me plaisait, d’exorciser des questionnements. À chaque fois que je relis des choses qui me rassurent, même si je les ai entendues mille fois, ça m’apaise. Je ne me tanne pas de redire mes questionnements, qu’est-ce qu’on fait sur la planète?; si tu veux être une rockstar, est-ce que tu es mieux d’être chez Desjardins ou de crever de faim en essayant d’être une rockstar? Les filles, c’est toujours la grande obsession. Je pars juste de mes questionnements. »
« Pour écrire un autre film, faudrait que je côtoie un autre milieu. Je suis entrain d’écrire un livre et j’écris sur mes tourments, mes doutes. Ça part de moi, de ce que j’ai vécu : une date qui rate, mes parents, mes petites angoisses. Si moi je vis ça, il doit y avoir d’autre monde qui le vit. » « Je pourrais sans cesse en faire des films de gars qui se questionne, mais je sens qu’il n’y a pas de réponse. J’espère que ce n’est pas juste un film sur l’angoisse et la page blanche. Ça ferait peut-être du bien d’écrire sur d’autre chose. » Le web, comme le cinéma d’ailleurs, permettent plus de libertés que la télévision. « C’est clair. Une chance qu’il y a internet, une chance qu’on a pu le faire notre petit projet. Ça n’aurait jamais passé à la télé. On travaille avec une production qui est un peu underground quand même... C’est sûr qu’on est content. Plus tu as une diffusion, plus t’es content. On est content parce qu’ils nous aiment, c’est niaiseux mais c’est ça. » Qu’y a-t-il après le film? Avez-vous un plan? « Si ça marche bien, une suite au Cas Roberge on aimerait ça... on aimerait l’idée de l’Europe, tsé qu’il parte à Paris en pensant que là il va être compris. » « J’écris des petites intros pour Marie Plourde à Loft Story, je vais continuer d’en faire. Ce n’est pas mon rêve, mais dans la vie on ne peut pas toujours toujours faire ce qu’on veut. Là j’écris un livre, c’est un gros défi que je me suis donné. » Est-ce qu’il faut absolument être drôle pour être écouté? « Je ne sais pas, je ne pense pas. C’est un réflexe, on est rassuré quand ça rit. Ce n’est pas un gage de succès. Ce n’est pas parce que c’est drôle que c’est nourrissant. » « C’est le réflexe des distributeurs. C’est une comédie, c’est l’été... C’est normal., quand tu es businessman tu veux faire de l’argent et tu supposes que les gens veulent rire. Nous, on a fait un un film qui nous plaisait à nous. » À la fin du film, tu regardes le spectateur directement, tu l’interpelles. Pourquoi? « C’est comme si c’était un appel pour dire que j’ai l’impression d’être aussi perdu que bien du monde, bien du monde dans un bureau, qu’une secrétaire. C’est un regard pour arrêter de fuir la caméra, de prendre le contact. C’est plus vrai, c’est sincère, on se regarde. Je pense que ça marche bien. » Raphaël Malo Est-ce que Le cas Roberge est vraiment une comédie? « Moi je pense que oui… t’as pas ri? » Oui, j’ai ri. « Ce n’est pas une grosse comédie, une ligne - un punch... c’est une comédie de questionnement. Benoît se pose tellement de questions existentielles. On rit de la radio, de la télé, de certaines situations avec Benoît et Stéphane. À la lecture du scénario, moi j’avais ri beaucoup. » Les gars n’ont pas hésité à embarquer dans l’aventure? « Je n’ai jamais eu d’écho qui disait qu’ils ne voulaient pas jouer ça. Je l’ai trouvé quand même très brave, Sébastien. L’image qu’on a de lui c’est cute, parfait... les matantes aiment ça. » Dans le film, on dit que tout a été dit. Est-ce que cela condamne les créateurs d’aujourd’hui aux mises en abîme?« Personnellement je ne pense pas que tout a été dit, qu’on a tout vu et tout entendu. Il y a des thèmes qui se répètent, mais de façon différente dépendant de la génération qui veut s’exprimer. Il y a des nouveaux sujets qui arrivent à chaque année, qui étaient tabous et qui le sont de moins en moins. » Et est-ce que le web a une influence sur la manière de créer? « Je pense qu’on ne le voit pas encore. Peut-être dans cinq ans... C’est sûr qu’il y a eu des trucs, comme Blair Witch Project, on a eu la DV, il y a eu Cloverfield. Il y a une petite vague, mais on va le voir de plus en plus dans cinq ans. Les créateurs qui sont allés sur le web, qui sont devenus matures par rapport au web. » « C’est sûr que sans internet, on n’aurait jamais fait de film. Internet nous a aidé à avoir de l’argent, il nous a aidé à pratiquer ce qu’on voulait faire. Quand on a su qu’on allait faire le film, en décembre, on a fait cinq autres capsules après, et j’ai commencé à faire des tests. J’ai fait des tests de jeu, parce qu’en cinéma il faut jouer beaucoup moins gros. » Visuellement, les deux demeurent très semblables... « C’est sûr que le film, je voulais qu’il ait un ton, une image très réaliste. C’est une histoire qui est réelle. C’est très différent en tournage, l’équipe est très grosse. Pour le web, on était quatre. » As-tu peur que l’élite cinématographique ait du mépris pour cette esthétique? « Non. S’il y en a, je m’en fous. » « Ce n’est pas un film léché avec des travelling, Hollywood, tout ça. C’est un peu trash. C’est la personnalité de Benoît. Sur le web, on s’est créé un look et on l’a emmené un peu dans ce film-là. Je ne me suis pas posé un million de questions, il y a un plan au trépied, c’est tout, tout le reste est à l’épaule, c’est comme ça que je le sentais. » Sébastien Benoît Parmi les quatre personnages, c’est toi qui prends le plus de risques. « Tu sauras me le dire, mais je ne sais pas si j’ai bien fait de les prendre. » Moi, je les trouve très drôles, mais je ne sais pas si les matantes dont il est question vont être du même avis... « Ce que tu dis là, c’est mon inquiétude. Je savais que des gars de ma génération vont pogner l’auto-dérision. Le risque c’est pour les gens plus vieux, à qui je m’adresse à tous les jours à la radio. Je suis conscient que je prends un risque, mais il n’y a pas de méchanceté envers les gens, c’est seulement de montrer un animateur comme il y en a encore, comme je l’ai déjà été, comme je peux l’être à certaines occasions, un animateur qui veut tellement plaire à tout le monde qui dit les choses que tu veux bien entendre. » « En même temps je ne te cacherai pas qu’il y avait un but discuté là-dedans de casser mon image de petit gars propret que j’ai toujours eue. Qui, je pense, est normal que j’aie, bien honnêtement, de par les choix artistiques que j’ai faits, c’est-à-dire des émissions où je n’avais pas l’occasion d’étaler mon opinion, des émissions de promotion comme Flash et La Fureur. » « Les gens ont toujours pensé, peut-être avec raison, que j’étais un téteux, un gars fin. Maintenant, les gens pourront dire qu’au moins, je le sais. » « Dans le fond, on ne sait pas ce que je pense, on sait juste que je pense la même affaire que la personne qui me parle. Je peux te dire que le Sébastien Benoît qui anime à Rythme FM et à Pyramide, il aime sa job, sinon il ne serait pas là. Mais je trouvais ça l’fun de me donner l’occasion de casser ça, de montrer un petit gars propre qui vieillit et qui va assumer ses opinions. Qui a mis du temps à comprendre que dans la vie, c’est pas tout le monde qui peut t’aimer. » Quand tu reçois le scénario, as-tu le pouvoir de faire des changements? « Oui. » En as-tu fait? « Oui, mais pas dans la direction que le personnage prenait. Juste des fois dans les mots. Veut, veut pas on n’est pas des comédiens de formation, c’était juste de le mettre dans nos mots. Raphaël, le réalisateur, et Benoît étaient assez lousses sur le fait de le mettre dans nos mots pour que ça ait l’air le plus naturel possible. »
« C’est ça mon défi. Je suis un animateur qui articule bien à Radio-Canada et à Rythme FM, là il fallait vraiment que je relâche. » « Je pense que Nicole Robert savait, quant elle nous a engagés sur le film, que Le cas Roberge, c’était ça; le phénomène internet et la synergie entre les quatre gars, même s’il y en a trois qui ne sont pas des comédiens de formation. » Stéphane E. Roy C’est sans doute très différent d’écrire un film et une capsule? « Tout à fait. Les capsules, ce qui comptait le plus c’était le flash, la petite idée, quelque chose à quoi tu ne penses pas pendant vingt ans, mais avec le même genre de dialogue. Tsé, des dialogues plus poussés, avec de la verve. Quand on est arrivé au film, ça nous prenait une quête, un but, quelque chose à atteindre. » Vous prenez aussi quelques risques avec le milieu... « On se tire un peu dans le pied... C’était le ton des capsules de dire les vraies affaires, alors on va dire les vraies affaires encore. » Avez-vous un plan de carrière, pour après, si on vous pardonne un jour?« Je ne veux pas parler pour les autres, mais on a eu la piqûre du cinéma. On a aimé ça, alors réécrire quelque chose, peut-être une suite, les aventures de Roberge ailleurs, ça serait intéressant. » Parce qu’en plus, vous n’êtes pas à la retraite, vous êtes encore dans le milieu artistique. « C’est un milieu où il y a beaucoup d’affaires qui ne sont pas dites. Et on les voit les mensonges... quand il y a un film qui a des mauvaises critiques, que tu as juste des bonnes critiques et que tu réalises que c’est des radios de région... Ou bien l’humoriste qui annonce trois soirs de supplémentaires au Saint-Denis... comme si le Saint-Denis on pouvait le réserver le lendemain de même parce que le show a bien été. Même si c’était un flop, il y aurait eu des supplémentaires. Il y a toute cette game-là dans le milieu qui était le fun à dévoiler. » Est-ce une nouvelle mode de faire des films sur soi? « Des films autobiographiques? C’est de l’air du temps, c’est sûr. J’aime ça parce que tu crées quelque chose de bien honnête, de bien proche de toi. Tu ne sais pas la part de la réalité, mais il y a quelque chose qui t’atteint dans le texte. » Jean-Michel Dufaux « Pour faire Le cas Roberge, il faut que tu mettes l’ego de côté, il faut que tu te choisisses ce qui va raconter la meilleure histoire. Moi-même, mon personnage, je ne l’aime pas à la fin, je n’aime pas comment il réagit. Mais j’aime mieux qu’il réagisse de même parce que ça va faire un film plus intéressant, plus étonnant, plus le fun. » Le film semble très inspiré de la vraie vie, sans doute d’expériences vécues... « Je voulais qu’il y ait un regard caustique sur le showbiz, sur le milieu de la télé, un regard pas méchant, mais assez critique. Je voulais aussi qu’on fasse beaucoup d’auto-dérision, parce que si on se permet de lancer des roches chez le voisin, il ne faut pas avoir une maison de vitre et être capable de se regarder avec dérision. » « Je pense qu’il fallait quand même changer nos noms pour se donner une petite liberté. On joue quand même un rôle, oui fortement influencé par qui on est et les gens qu’on côtoie. Mais il fallait être un peu caustique. » Mais le risque est présent que le public pense qu’il voit la réalité. « Je fais confiance en l’intelligence du monde. C’est un rôle, ça reste un rôle, dès que c’est écrit c’est de la fiction. Je me dis que les gens qui comprennent pas, bien ils ne comprendront pas. Le danger d’aller vers le plus bas dénominateur commun, c’est de faire toujours des affaires pour enfants. Je fais confiance aux gens, ils vont faire la différence, et ceux qui ne la feront pas, ça ne me dérange pas. » Faut-il absolument être drôle pour avoir de l’attention? « Il faut surtout être sans prétention. Je trouve ça plus important de raconter une histoire pendant 1h35 que d’être drôle. » « D’ailleurs, le film a permis d’aller plus loin dans certains thèmes. Sur le web, ça reste 2 minutes et demie, des sketchs, avec un seul thème. Là, on voulait raconter une histoire sur le milieu, sur les absurdités, sur le bonheur et les aspirations de Benoît. C’est aussi un film sur l’écriture, des gars qui vont à Rouyn pour s’éloigner des distractions. » Nicole Robert Comment le projet est-il né? « C'est Benoît et Jean-Michel qui m’ont approchée parce qu’ils voulaient faire un long métrage. Un mélange entre la réalité et la fiction, avec eux-mêmes, avec des amis qu’ils ont, et qui se passait dans le showbusiness. » « Je les ai toujours trouvés très sympathiques, je les suivait dans leurs chroniques de voyages qu’ils faisaient à Canal Évasion. J’ai été séduite par le personnage de Benoît, qui a un questionnement profond sur la vie, sur notre place. » Mais parmi toutes les propositions que vous recevez, pourquoi celles-là? « J’ai beaucoup de propositions de films, et je les rejette presque toutes, sauf ma gang... Je trouvais que celui-ci avait des personnages, un ton, entre la réalité et la fiction. J’avais envie d’aller voir plus loin. C’est une question de timing aussi des fois. Benoît c’est vraiment un auteur, il a vraiment des choses à dire, et Jean-Michel est celui qui fait que les choses se passent. » Une fois que le projet est en marche, que doit-on surtout surveiller? « Dans ce cas-ci, il y a plusieurs embûches. Petit budget, pas beaucoup de temps, c’est un sprint. Il faut faire attention que ce soit aussi un long métrage et pas seulement une série de courts métrages. Et comme les capsules ont du succès, on crée aussi une attente dans un genre différent, donc c’est risqué. »
Le film prend l'affiche le vendredi 15 août. Lisez la critique ici.