Le troisième film de Carole Laure, La capture, prend l'affiche cette semaine et les acteurs et actrices principaux du film étaient réunis sur le tapis rouge, lundi soir dernier au Cinéma Impérial. Les acteurs du film Catherine de Léan, Pascale Bussières, Laurent Lucas et la réalisatrice étaient présents.
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Rose et Félix ont vécu dans la peur de leur père violent, qui a laissé leur mère presque catatonique, incapable de quitter son mari ou de le dénoncer. Félix, lui, préfère fuir et se joindre à une bande de petits criminels, mais Rose, réfugiée à Montréal, décide de prendre les grands moyens pour libérer sa famille de l’emprise du père. Elle l’enlève et le séquestre, sans aviser son entourage.
Carole Laure
Il s’agit d’un troisième long métrage pour Carole Laure, après Les fils de Marie et CQ2. L’ancienne actrice signe le scénario et la réalisation. « Ça va dans la lignée de mon écriture, j’aime bien faire des films sur l’humanité, la dignité humaine, la résilience. »
« J’ai toujours voulu faire des films où la beauté et la sexualité côtoient la violence, la soumission et la laideur. »
« Dans celui-là en particulier, j’ai pris un consultant pour le scénario, qui est Jean-Marc Dalpé. Ce film-là demandait une structure, quand même… C’est un film où j’ai du réalisme, beaucoup, mais où j’ai du réalisme poétique. Le défi, c’est de faire tout ça avec la même patte cinématographique. Il faut traiter les deux dans la même forme de mise en scène. »
Le film montre une relation fille-père, ce qui est plutôt rare. « Là, en plus, c’est dans une situation où les traumatismes familiaux sont les plus difficiles. Ce n’est pas parce que tu es empreint de souvenirs durs que tu ne peux pas progresser dans la vie et changer le cours des choses. »
« J’ai fait le portrait de la féminité sous deux formes : la femme soumise et la femme animale. Elle pose un geste très violent, parce qu’elle ne sait plus comment arrêter ça, mais contrairement aux films américains où sa violence se terminerait dans une rafale de violence, elle lutte contre ça. »
« Ça m’importe de toucher des gens qui sont dans une situation difficile pour qu’ils voient la lumière au bout du tunnel. »
« Mais la culture d’un homme violent ne change pas. Elle essaie tout, mais ce n’est pas lui qui change, c’est elle. Elle devient le chef de la famille. »
Catherine de Léan a donc beaucoup de responsabilités dans le rôle principal. « C’est difficile pour une jeune fille de vingt ans de ne pas être dans la séduction. Ce n’est pas un rôle de séduction. Il fallait que ce soit crédible. C’est pour ça que je l’ai choisie. »
Le film a plusieurs moments très inhabituels, en particulier cette métaphore des animaux, très présents dans le film. « J’aime faire des séquences sans trop d’explication. C’est du réalisme pas réaliste. Quand elle lui met les animaux, on a l’impression qu’elle lui dit : t’as quelque chose à apprendre d’eux. »
« Mes deux premiers films ont été sélectionnés à Cannes, ça m’a donné beaucoup de confiance. Celui-là a été sélectionné à Locarno… J’ai vraiment envie de continuer même si j’en ai fait trois en cinq ans, c’est beaucoup. Je vais continuer, j’aime ça, mais je fais mes choses très sincèrement, ce sont des choses qui me tiennent à cœur. Mon cinéma est en mouvement et en poésie. C’est fait à ma façon. »
Catherine de Léan
Qui est Rose? « Le rôle c’est un personnage fort, une femme forte, une héroïne plus grand que nature. Une femme qui n’est pas dans la séduction, un rôle où il y a toute une gamme d’émotions à jouer. »
« C’est un Électre des temps modernes. Elle gravite dans un univers créé et orchestré par Carole Laure. »
Il y a dans le film plusieurs scènes très intimes. « Il y a souvent une fraternité sur la plateau, une petite bulle où on est vraiment bien ensembles. »
« Pascale et Laurent ont beaucoup d’expérience et moi j’avais l’impression d’avoir beaucoup à apprendre d’eux… ils m’aidaient vraiment à me rendre confiante. J’ai beaucoup appris juste à les regarder. »
Comment était la réalisatrice? « Elle connaissait son histoire et ses personnages de l’intérieur. Elle savait vraiment ce qu’elle voulait pour chaque scène. Elle était très spontanée, elle allait chercher ce qui se passait sur place. »
« Ce que j’aime le plus c’est quand on collabore, j’aime ça quand tu peux proposer et qu’on travaille à partir de ça. »
« Pendant le tournage, j’ai vraiment fait juste ça. De toute façon c’est tellement exigeant, moi j’étais là presque tous les jours. Le soir, je rentrais et je relisais mon texte, j’allais courir, je me couchais et j’y retournais le lendemain. Je n’avais pas envie de sortir non plus parce que c’est un univers tellement demandant, ça demandait vraiment un implication que je n’avais pas envie d’en sortir et de rentrer. »
Pascale Bussières
Comment vous a-t-on présenté le projet? « J’étais en tournage au Nouveau-Brunswick, et Carole tentait de me rejoindre pour me proposer un rôle dans son film. Mais pour moi c’était très clair qu’en revenant je ne m’embarquais pas dans un autre film. Mon fils commençait l’école, j’ai fait un espèce de blocus. »
« Mais je ne la connaissais pas, Carole. On fait le métier depuis très longtemps mais on ne s’était jamais rencontrées. Finalement, j’ai lu le scénario et j’ai trouvé ça super bon. Là, les problèmes commencent. »
« Carole, c’est quelqu’un de très en vie, qui a la capacité de rebondir. C’et quelqu’un qui fait des choses. Je la trouve très douée pour aller au bout de ses affaires. Ça prend beaucoup d’énergie. »
« Je trouvais que le scénario abordait un sujet extrêmement délicat, répandu mais qu’on a du mal à détecter parce que c’est un problème complexe. Personne n’en parle aisément. Je trouvais qu’elle l’abordait comme une fable, avec un réel regard d’auteur, avec un univers un peu décalé du réel. »
Le film est entre réel et poésie. « Moi, j’avais le côté peut-être plus « réaliste » à jouer. La mère est plus ancrée dans une réalité sans issue. Elle est anéantie, il n’y a plus rien dans cette femme-là. Elle n’a plus la force de se rendre compte de ce qui se passe. »
« Je trouvais que c’était un scénario intelligent, très bien construit. »
La réalisatrice a déjà été actrice... « Il y a des choses qu’elle comprend très très bien, même pas de l’ordre de la parole. Carole a fait un travail intellectuel en écrivant ce scénario-là, mais une fois sur le plateau, c’est de l’ordre du ressenti physique. Elle est très ouverte à la spontanéité, elle a cet aplomb qui lui permet d’être ouverte à l’imprévu. »
« Elle se laisse guidée par ce qui se passe, par ce qu’elle voit. »